Le Parlement bruxellois a voté, ce 4 avril 2025, l’entrée en vigueur de plusieurs articles de l’ordonnance du 28 octobre 2021 visant à instaurer une commission paritaire locative et à lutter contre les loyers abusifs. À partir du 1er mai 2025, les bailleurs ne pourront plus fixer un loyer supérieur de 20% à la grille indicative des loyers sans justification valable.

Votée en 2021 mais restée partiellement inappliquée, l’ordonnance voit sa mise en œuvre complétée par l’entrée en vigueur des articles 8 à 13, jusqu’alors restés en suspens. 

Ces entrées en vigueur entraînent-t-elles des conséquences sur les pouvoirs locaux ?

Le pouvoir public en tant que bailleur

Les communes et les CPAS, « opérateurs immobiliers publics »

Certaines communes et CPAS bruxellois sont eux-mêmes propriétaires de logements locatifs. L’ordonnance prévoit que la Commission paritaire locative est compétente afin de rendre des avis sur la justesse du loyer pour tout bail d'habitation, en Région bruxelloise, qui répond à deux conditions cumulatives :

  • En premier lieu, le bail d’habitation en Région bruxelloise ne doit pas être conclu par un opérateur immobilier public à savoir une commune, un CPAS, une régie communale autonome, la Régie foncière de la Région de Bruxelles-Capitale, la Société du Logement de la Région de Bruxelles-Capital (SLRB), une Société immobilière de Service public (SISP), le Fonds du Logement de la Région de Bruxelles-Capitale et la Société de Développement pour la Région de Bruxelles-Capitale (SDRB) ou une agence immobilière sociale.
  • Ensuite, le loyer ne doit pas faire l’objet d’un encadrement par une ordonnance ou un arrêté du Gouvernement. 

Il ressort de ces dispositions légales que les communes et les CPAS ne sont donc pas soumis à ces articles, puisqu’ils sont bien des opérateurs immobiliers publics et ont, à ce titre, des règles propres d’attribution de logements et de fixation de loyers (voy. articles 24 et suiv., par exemple).

Impact sur le travail d’accompagnement des locataires

Cependant, les CPAS et communes pourraient tout de même être concernés en tant qu’intermédiaires et acteurs de première ligne citoyenne, via des locataires qui aimeraient invoquer l’ordonnance pour bénéficier d’un loyer plus juste dans leurs logements privés. L’enjeu sera donc de former les travailleurs sociaux à l’identifications des loyers abusifs pour pouvoir lancer le processus.

Fonctionnement

Pour donner un aperçu non-exhaustif de ces mesures, l’ordonnance précise par exemple que le loyer est présumé abusif s’il dépasse de 20% la référence fixée par la grille régionale, sauf justification fondée sur des éléments de confort importants ou liés à l’environnement du bien. Le locataire peut saisir la Commission paritaire locative (CPL) s’il estime que le loyer est abusif.

À l’inverse, un logement présentant des défauts de qualité pourrait voir son loyer considéré comme excessif, même s’il reste sous le seuil des 20%. Selon une estimation de chercheurs de l’ULB, environ 20% des baux bruxellois pourraient relever de cette présomption d’abus (d’après l’étude réalisée par l’ULB lors de la conception de la grille des loyers, disponible sur https://loyers.brussels/a-propos-des-loyers-de-reference ).

En cas de désaccord, les parties ont la possibilité de saisir la Commission paritaire locative (CPL) pour une tentative de conciliation. Faute d’accord, un recours pourra être introduit devant le juge. Ce dernier pourra statuer sur une révision du loyer, à la hausse ou à la baisse, selon les éléments présentés. 

La Commission paritaire locative peut aussi être saisie directement par toute personne intéressée, comme une organisation de défense des locataires, ou par le juge compétent afin d’obtenir un avis sur la justesse d’un loyer d’une habitation.

Jusqu’à présent, la grille des loyers n’avait qu’une valeur indicative. Désormais, elle acquiert un rôle central dans l’évaluation des loyers. L’enregistrement des baux depuis le 1er janvier 2025, sur une plateforme régionale participe à la volonté d’améliorer la fiabilité de cette grille.

L’ordonnance donne une série de précisions et conditions, notamment sur le mode de saisine de la CPL, les délais, les conditions pour la révision... Nous vous renvoyons au texte légal pour ces détails supplémentaires. 

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