Les trois Fédérations des CPAS ont remis fin décembre 2024 un avis d’initiative relatif à une proposition de loi modifiant le régime de la prime d’installation.

Cette proposition, déposée par le député Monsieur Wouter Raskin, reprend à un élément près les termes de celle déposée auparavant par Madame Valérie Van Peel, le 21 janvier 2020 (Sess. 2019-2020, Doc 55-0952/001) et pour laquelle les Fédérations avaient déjà émis un avis (2022-03).

CADRE LÉGAL

Pour les personnes qui perdent leur qualité de sans abri, il existe deux types de prime d’installation :

  • celle qui trouve son fondement dans la loi sur le Droit à l’Insertion Sociale (L.DIS, art.  14, par. 3)
  • et celle basée sur la loi organique des CPAS (L.O., art. 57bis ainsi que l’A.R. 21.9.2004).

Les conditions d’octroi sont relativement similaires.

Toutefois, dans le cadre de l’arrêté royal de 2004, il est notamment précisé que « Dans le cas où deux ou plusieurs sans-abris s'établissent à la même adresse et constituent un ménage, une seule prime d'installation est octroyée » (article 2, par. 1erin fine)

Par contre, la possibilité d’octroyer plusieurs primes existe dans le cadre de la loi DIS.

ANALYSE DE LA PROPOSITION DE LOI

La prime d’installation « par adresse »

L’auteur de la proposition de loi entend mettre fin à la possibilité d’octroyer plusieurs primes d’installation lorsque plusieurs personnes sans-abri emménagent ensemble. Or, l'extension du régime LO sur le régime LDIS revient à harmoniser « vers le bas », ce qui s’oppose à la position soutenue par les trois Fédérations des CPAS  depuis de nombreuses années en termes d’individualisation des droits.  

  • De manière générale, les Fédérations ne voient pas l’intérêt d’apporter des modifications à un dispositif qui fonctionne très bien et ne suscite pas de difficultés de terrain ;
  • Ce changement législatif n’apparait pas comme nécessaire, étant donné qu’en pratique, les CPAS conseillent déjà souvent aux ménages de n’introduire qu’une seule demande de prime, au cas où le ménage connaitrait une nouvelle situation ultérieure de sans-abrisme ;
  • Si une harmonisation doit avoir lieu, elle doit se faire de manière la plus avantageuse, à savoir une prime par personne sans abri répondant aux conditions (LDIS) et non par ménage (LO) ;
  • Par ailleurs, l'aménagement pour plusieurs adultes engendre bel et bien des frais supplémentaires (frigo, table, literie, taille de canapé).

La majoration par enfant mineur

La proposition prévoit une majoration de la prime de 125 euros par enfant mineur afin de couvrir les coûts d’aménagement proportionnels au nombre d’enfants. En cas d’hébergement égalitaire des enfants, chacun des parents peut solliciter l’octroi de la majoration.

Les Fédérations accueillent favorablement cette majoration mais elle devrait pouvoir être étendue aux enfants majeurs à charge. Elles regrettent cependant qu’en cas d’hébergement inégalitaire chacun des parents ne puisse pas solliciter la majoration. En effet, un tel hébergement ne nécessite pas moins de coûts d’aménagement.

Le paiement par tranche de la prime et la constitution d’une réserve

La proposition permet aux CPAS d’une part de payer la prime d’installation en plusieurs tranches afin de n’allouer que la part nécessaire et d’autre part de constituer une réserve au cas où le bénéficiaire connaîtrait une nouvelle situation de sans-abrisme ultérieurement dans sa vie

Les Fédérations des CPAS ne se montrent pas favorable au paiement par tranches de la prime pour trois raisons :

  • risque de surcharge administrative pour les CPAS ;
  • 1 741,29 euros [montant indexé au 1er janvier 2025] est une somme vite dépensée et il est important de laisser au bénéficiaire son autonomie et la responsabilité de gérer cette somme ;
  • ne favorise pas les achats en seconde main pour lesquels il n’est pas toujours possible d’obtenir une facture.

Aussi, la constitution d’une réserve entraine des interrogations :

  • la personne devra-t-elle à nouveau connaitre une situation de sans-abrisme avant de pouvoir prétendre au solde de la prime ou pourrait-elle le réclamer quand un besoin se fera sentir ultérieurement ?
  • Dans l’hypothèse de l'emménagement d’un ménage, sur « quelle tête » le droit sera-t-il ouvert ?
  • Qu’en est-il si un des membres du ménage connait une nouvelle situation de sans-abrisme?
  • Quid si la personne change de territoire? La réserve doit-elle être transférée de CPAS en CPAS ?

Consulter l’avis complet des fédérations