A quelques mois des élections du 26 mai 2019, les fédérations des CPAS des 3 associations de villes et communes du pays (VVSG, UVCW et Brulocalis) ont bouclé leurs revendications à l'égard du futur gouvernement fédéral. Ce mercredi à Bruxelles, les fédérations des CPAS wallons et bruxellois ont dressé un constat pour le moins préoccupant, développé leur argumentaire et leur cahier de doléances, le tout assorti de propositions très concrètes.

Le constat


Pour Jean SPINETTE, co-Président de la Fédération des CPAS Bruxellois de Brulocalis, «tous les indicateurs relatifs à la pauvreté sont alarmants en Belgique: entre 15 et 20 % des habitants vivent sous le seuil européen de pauvreté (18,5 % des enfants, 1 personne âgée sur 5 encourt un risque) ; le nombre de bénéficiaires d’un revenu d’intégration ou d’une aide équivalente a encore cru en 2018 pour atteindre 150.000 (+ 35 % par rapport à 2004) ; un flux constant et toujours croissant de personnes font appel au CPAS, pour différentes formes d’aide sociale ; la pauvreté touche un public de plus varié : jeunes, personnes âgées, travailleurs pauvres, personnes ayant des problèmes de santé, singulièrement mentale ».

« C’est un véritable scandale ordinaire ! Toute personne a droit à l’aide sociale pour pouvoir mener une vie conforme à la dignité humaine. Chaque CPAS du pays a pour mission d’assurer cette aide, et chaque niveau de pouvoir est sensé se mobiliser en ce sens », tonne Luc VANDORMAEL, Président de la Fédération des CPAS wallons de l’UVCW.

Une stratégie globale et un pacte ambitieux


Et de mettre tout le monde au défi et face à ses responsabilités : « outre une protection de l’autonomie juridique de l’institution CPAS bruxellois et wallon, élément essentiel pour l’exercice de ses missions, nous invitons l’État fédéral, les entités fédérées et les administrations locales à élaborer une stratégie globale ambitieuse et à conclure un Pacte, afin que, à l’horizon 2024, plus personne dans ce pays ne vive sous le seuil de pauvreté européen ».

Jean SPINETTE clarifie l’intention : «concrètement, il s’agira d’inscrire, dans le futur accord de gouvernement fédéral, la volonté d‘augmenter les allocations sociales les plus basses et les revenus d’intégration jusqu’au niveau du seuil de pauvreté européen. Progressivement, tenant compte de quelques principes directeurs:
  • Travailler doit toujours être plus attrayant que bénéficier d’une allocation ;
  • Il faut progresser dans l’individualisation des droits, e.a. envers la cohabitation, protection évidente contre la pauvreté ;
  • Toutes les allocations doivent dépasser le revenu d’intégration, ce qui met fin à la chasse aux petits compléments et à la charge administrative qui en résulte ;
  • L’accès aux avantages sociaux ne peut plus être lié à un statut déterminé, mais au revenu du demandeur ;
  • Des mécanismes d’interventions financières et d’exonérations qui épousent mieux le parcours d’insertion sociale et professionnelle favorisent un passage graduel de l’aide sociale à l’emploi.

« En contrepartie, nous, CPAS, nous engageons à affecter ces moyens supplémentaires à un meilleur accompagnement de nos usagers, sur mesure et dans leur univers quotidien, à une plus grande collaboration entre nous, au partage de l’expertise, et à l’échange de bonnes pratiques ».

Soutien financier et reconnaissance feront la différence


Pour Luc VANDORMAEL, « les CPAS remplissent leurs missions avec succès, de façon parfois quasi miraculeuse en termes de résultats par rapport aux ressources, mais pourraient faire encore mieux s’ils étaient davantage reconnus dans leur rôle et soutenus financièrement ou à tout le moins remboursés correctement en conséquence ». S’ensuit une longue série de revendications :

« Les CPAS, partenaires de l’État fédéral et des entités fédérées dans la lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale, ne peuvent toutefois agir efficacement sans le soutien des autres pouvoirs ». Ils prennent ainsi en charge une grande part du revenu d’intégration (45 % dans la plupart des communes) et accordent sur fonds propres des aides financières supplémentaires, comblant ainsi avec leurs propres moyens une partie du fossé de la pauvreté. « Cela requiert un remboursement correct via un financement structurel. Certes, les divers gouvernements fédéraux ont récemment pris plusieurs mesures positives sur le plan financier, mais force est de constater que ce n’est pas suffisant, ni en montant, ni en durée ».

L’indemnisation des coûts de personnel relatifs aux dossiers de revenu d’intégration doit être majorée jusqu’aux coûts réels et indexée. De même, pour les dossiers d’aide équivalente au revenu d’intégration et les dossiers d’aide médicale. Un financement intégral et une hausse de l’intervention fédérale dans les coûts du revenu d’intégration jusqu’à 90 % pour tous les CPAS sont attendus.

Communes et CPAS, les oubliés du Tax shift


« Comme les infrastructures de soins privées, les CPAS veulent bénéficier des avantages du Tax shift », (cotisation patronale réduite pour les bas salaires et cotisation patronale à 25 % pour les services de soins à domicile).

Les missions d’accompagnement et de prévention des CPAS doivent être correctement remboursées, sur toute la durée (gestion et guidance budgétaire, accompagnement des personnes vers le travail). De même, les activités favorisant la participation sociale, culturelle et sportive des groupes fragilisés doivent être structurellement financées. L’État fédéral doit étendre le remboursement des soins psychologiques de première ligne à toutes les catégories de population.

« Les différents fonds d’énergie fédéraux doivent être indexés chaque année pour accompagner et soutenir les personnes en situation de précarité énergétique, indépendamment de la source d’énergie qu’elles utilisent (gaz, électricité, mazout). La revalorisation et l’indexation du Fonds gaz-électricité est une urgence absolue », insiste Luc VANDORMAEL.

En matière de surendettement, une attention accrue pour la dignité humaine est souhaitée (moins de frais de procédure et de recouvrement, moins de pression sur les débiteurs insolvables).

Les CPAS jouent un rôle important dans la concrétisation de la politique fédérale à l’égard des étrangers par leur offre de places d’accueil en ILA, par l’aide médicale urgente, etc. « Le financement intégral fédéral de ces missions doit être garanti. Les CPAS réclament aussi une politique plus rationnelle et une clarification du rôle joué par les CPAS, une communication meilleure de la part des instances compétentes à propos de la réglementation et une transmission suffisante si pas optimale des informations via la Banque-carrefour de la Sécurité sociale (BCSS) ».

« Last but not least, au risque de nous répéter, l’État fédéral doit mettre fin au transfert des charges sur le dos des CPAS. Que l’on songe aux économies dans la réglementation du chômage ou à l’indemnisation insuffisante des personnes porteuses d’un bracelet électronique, conduisant plus vite les gens vers le revenu d’intégration. Le Fédéral doit compenser entièrement les coûts quand il prend des mesures qui touchent financièrement les CPAS », ponctue Jean SPINETTE.

Contact

  • Fédération des CPAS wallons : Alain VAESSEN, Directeur général (081/240 650 – alv@uvcw.be)


Les memorandums des Fédérations de CPAS