Brulocalis a été consulté par le ministre de la Transition climatique, de l’Environnement et l’Energie, Alain Maron, à propos du projet de stratégie de propreté urbaine « clean.brussels », qui sera lancée avant la fin de l’année 2022. La nouvelle stratégie adopte dans son ensemble une approche transversale, fédérant des acteurs publics et privés, ainsi que les usagers et usagères, au travers de 65 mesures

La stratégie propose des mesures-phares stratégiques et innovantes, dont notamment :

  • L’évaluation des impacts environnementaux de l’implémentation d’un système de consignes pour les bouteilles en plastique PET et les cannettes ;
  • Une analyse de la généralisation de la collecte via des points d’apport volontaires enterrés ;
  • La mise en place de la transaction administrative immédiate pour les infractions en lien avec les questions de propreté urbaine ;
  • La mise en place d’un nouvel appel à projets pour les communes (point d’attention quant à la pérennisation des projets qui seront mis en place) ;
  • La généralisation de l’utilisation d’indicateurs objectifs et chiffrés de propreté urbaine
  • La création d’un Conseil de coopération 

1. Questionner plus fondamentalement le modèle actuel

Bien que ces mesures soient encourageantes et explorent de nouvelles pistes de recherche pour une meilleure propreté urbaine à Bruxelles, Brulocalis déplore que certaines évaluations et analyses (notamment pour l’implémentation d’un système de consignes et pour les points d’apport volontaires enterrés) n’aient pas eu lieu en amont du plan afin de proposer une transformation plus profonde du système de collecte actuel en Région Bruxelles-Capitale.

Par ailleurs, plus fondamentalement, il semble que la stratégie régionale devrait davantage questionner le modèle actuel basé en grande partie sur la collecte des déchets en porte à porte. Bruxelles donne aujourd’hui parfois l’impression d’être une ville sale – tant aux yeux des Bruxellois que des touristes - en grande partie en raison de la présence quasi quotidienne de sacs poubelles sur les trottoirs. Il est essentiel d’ouvrir la réflexion sur de nouveaux modes de collecte, en s’inspirant aussi de l’étranger afin de dégager des solutions pour des enlèvements et des méthodes rapides et efficaces.

Dès lors, la collecte via des containers dédiés (enfouis ou pas) doit être une piste à explorer sérieusement (certainement dans le cas de nouveaux quartiers en développement). Ils permettent une gestion intelligente et efficace des tournées (organisées en fonction de leur taux de remplissage). Les containers constituent en outre une bonne solution pour les citoyens et les familles nombreuses vivant dans de petits appartements et qui ne pourraient pas faire face au passage à une seule collecte par semaine. Enfin, ils permettent de dégager les trottoirs des sacs poubelles, sécurisant ainsi le cheminement des piétons.

Brulocalis souligne la nécessité d’aller plus loin en matière de système de consignes. Ce système semble actuellement déjà en test dans certaines communes flamandes et wallonnes. Pourquoi ne pas étudier davantage ces expériences pilotes et envisager une coordination, voire une harmonisation entre les 3 Régions ?

2. Recours aux nouvelles technologies

La nouvelle stratégie pourrait utilement renforcer le recours aux nouvelles technologies. Des poubelles ou des containers intelligents et connectés permettraient d’organiser efficacement les tournées en fonction de leur taux de remplissage. Certaines communes ont d’ailleurs déjà recours à ces technologies pour la gestion de leurs poubelles publiques.

3. Concernant le système de collecte

Brulocalis regrette que les nouvelles mesures concernant le système de collecte ne soient pas intégrées à la stratégie clean.brussels. Cela aurait été souhaitable en termes de cohérence et de bonne gouvernance. Ces mesures concernent l’encouragement / l’obligation du tri pour les biodéchets et le passage à une collecte hebdomadaire pour les sacs blancs et oranges.

Même si le principe de passer à une seule collecte hebdomadaire peut inciter les citoyens à davantage encore réduire leur production de déchets, nous signalons que ce changement peut engendrer des désagréments (odeurs, nuisibles, etc.) importants par exemple pour les familles nombreuses habitant dans des logements de petites tailles. Autre conséquence de ce changement, le risque de multiplication des dépôts clandestins (et comme corollaire, l’augmentation des besoins d’interventions des communes et les coûts importants que cela pourrait représenter pour les finances communales…).

Il sera donc nécessaire de prévoir des mesures d’accompagnement, indispensables à la mise en place de ce nouveau mode de fonctionnement, à savoir :

  • Une période d’adaptation au tri des déchets organiques avant de supprimer la deuxième tournée et une nouvelle sensibilisation au tri de façon générale ;
  • Une large distribution de poubelles rigides oranges afin d’éviter l’éventrement des sacs par les animaux sauvages ;
  • Le regroupement de la collecte des différents sacs le même jour de la semaine et l’optimalisation des jours de collecte sur l’ensemble du territoire, afin de limiter la présence des sacs-poubelles en rue et de communiquer de façon plus claire et efficace vers les citoyens.

4. Développer une ambitieuse stratégie de prévention sur le terrain

Le meilleur moyen de gérer les déchets, c’est d’en produire moins à la source. Pour cela, il est indispensable de développer une stratégie forte de prévention et de sensibilisation. Nous encourageons donc la Région à penser une stratégie régionale s’appuyant sur la dimension locale. A cet égard, il nous semble que les comités de quartier, les associations locales, les mouvements de jeunesse ou encore les écoles apparaissent comme de puissants relais de prévention et de sensibilisation, pour autant qu’on mette des moyens suffisants et des outils performants à leur disposition.

5. Concernant la qualité des prestations de l’Agence Bruxelles Propreté

La bonne implémentation de ces nouvelles mesures du système de collecte, tout comme les mesures citées dans la nouvelle stratégie de propreté publique clean.brussels, vont de pair avec l’amélioration substantielle de la qualité des prestations de l’ABP, dont la mission exclusive est la collecte des déchets ménagers et le nettoyage des voiries régionales. Cela implique que l’ABP doit gérer l’ensemble des déchets présentés à la collecte. Elle ne peut en aucun cas s’en décharger au détriment des communes. 

Les changements apportés en termes de diminution des collectes augmenteront le nombre de sacs laissés sur les trottoirs, et donc augmenteront de manière significative les coûts de prise en charge par les communes en cas de manquement de l’ABP. Ces manquements engendreront des difficultés opérationnelles liées à une compétence qui ne fait pas partie de la mission des communes, le tout dans un contexte financier difficile.

6. Concernant les sanctions administratives

Le plus gros problème ne se situe pas tant au niveau des poursuites et du recouvrement des amendes – qui fonctionne relativement bien au niveau communal (même si la transaction immédiate pourrait aider encore davantage). Le problème est surtout de constater les infractions : la transaction administrative est une bonne idée mais elle est insuffisante. Il faut surtout donner davantage de moyens pour constater les flagrants délits (notamment via l’installation de caméras intelligentes dans les hotspots ou la mise à disposition des communes de caméras mobiles). A cet égard, il nous semble important également d’augmenter le nombre et de enforcer la formation des agents constateurs.

Les communes assument un rôle très important dans la chaine du contrôle/sanction et doivent bénéficier du montant des amendes qu’elles constatent, tout en gardant leur pleine autonomie en fonctionnant avec des SAC et/ou des taxes selon leurs spécificités ; la Région n’est en principe pas compétente pour légiférer en ces matières.

Conclusion

Brulocalis soutient la réforme proposée, moyennant un engagement fort en ce qui concerne l’amélioration de la qualité des prestations de l’ABP, prérequis essentiel à la bonne mise en place des mesures citées ci-dessus dans l’ensemble du territoire régional. Nous regrettons que les nouvelles mesures concernant le système de collecte ne soient pas intégrées à la stratégie clean.brussels, et que le modèle actuel basé en grande partie sur la collecte des déchets en porte à porte, ne soit pas assez questionné.

Le Ministre Maron a d’ores et déjà annoncé que de nombreuses mesures sont en préparation pour accompagner les Bruxelloises et les Bruxellois dans ces changements. Ceci inclut notamment la mise en place de campagnes de communication, la distribution de milliers de conteneurs orange et le développement de guides de tri.